Des réponses sont attendues de la part de la France, dont l’investissement financier pour les droits des femmes n’est pas au niveau de celui des autres diplomaties dites féministes, comme la Suède ou le Canada.
8 mars 2020,
Le 8 mars 2019, Emmanuel Macron annonçait dans le cadre de la présidence française du G7, la création d’un “fonds doté de 120 millions d’euros afin d’aider les mouvements en faveur des droits et de la condition des femmes”. Un an après, et à quatre mois du forum mondial Génération égalité qui sera accueilli par la France, le gouvernement est en train de revenir sur cet engagement. Pourtant, accroître de manière significative et durable les moyens alloués aux mouvements et associations féministes à travers le monde est une condition sine qua non pour atteindre l’égalité femmes-hommes.
Depuis le mouvement mondial #MeToo, jusqu’aux marches #NousToutes contre les violences faites aux femmes en France, en passant par les manifestations contre les féminicides au Mexique, ou encore les mobilisations tunisiennes pour l’égalité face à l’héritage, les mouvements féministes sont en train de transformer en profondeur les rapports de pouvoir entre les femmes et les hommes. L’ampleur de la tâche est immense. Mais les moyens financiers qui lui sont accordés sont minimes. Alors que nos sociétés commencent à prendre la mesure des inégalités femmes-hommes, les associations féministes ne peuvent plus faire “avec les moyens du bord”. De plus, la multiplication d’appels à projets de court terme, avec des enveloppes limitées, instaure un système compétitif qui aggrave leur précarité.
En consacrant l’égalité femmes-hommes comme grande cause du quinquennat, en annonçant la mise en place d’une diplomatie féministe et en lançant le Grenelle des violences conjugales, le gouvernement français affiche la volonté d’avancer. Mais la question des financements reste le point d’achoppement.
La France y mettra-t-elle les moyens?
Depuis le Conseil des ministres du 6 mars 2019, qui entérinait la “création d’un fonds de 120 millions d’euros par an pour aider les mouvements pour l’égalité entre les femmes et les hommes et les mouvements féministes, notamment du Sud”, plusieurs ministres ont tenu des propos contradictoires à ce sujet. À ce jour, le fait est que ce fonds n’existe toujours pas.
Les montants annoncés seront-ils réellement attribués aux associations féministes? Seront-ils renouvelés sur une base annuelle? Les modalités d’octroi seront-elles élaborées en collaboration avec les associations féministes et adaptées à la réalité du secteur? Des réponses sont attendues de la part de la France, dont l’investissement financier pour les droits des femmes n’est pas au niveau de celui des autres diplomaties dites féministes, comme la Suède ou le Canada.
L’égalité femmes-hommes étant la grande cause du quinquennat au niveau national, la cohérence exige aussi des arbitrages budgétaires en faveur des politiques d’égalité femmes-hommes et des mouvements féministes en France. Le gouvernement doit dès maintenant débloquer des financements conséquents et les pérenniser dans les budgets, aussi bien au niveau domestique, qu’au niveau international, à travers par exemple la future loi de développement et de solidarité internationale.
Alors que la France prépare activement le Forum Génération Égalité de juillet 2020 à Paris, son crédit et sa légitimité sont en jeu.
Contributeurs/Contributrices :
Céline Piques (Porte-parole d’Osez le Féminisme !), Aurélie Gal-Régniez (Directrice exécutive, Equipop), Rana Hamra (Co-fondatrice et directrice Exécutive, Humanity Diaspo) et Philippe Jahshan, Contributeur (Président, Coordination Sud)