Compte-rendu de la mission d’observation des migrants à Lampedusa du 18 au 20 décembre
A l’occasion de la journée mondiale des migrants du 18 décembre 2017, la FTCR et le C.I.T.i.I. (Comité des Immigrés Tunisiens en Italie), membre de la FTCR, ont organisé l’envoi d’une mission d’observation à Lampedusa pour examiner la situation des migrants et demander l’exercice de leurs droits en matière de séjour et du respect de la liberté de circulation qui doit accordée être accordée à toutes et tous quelque soit la nationalité.
Cette mission intervient pour la FTCR, à la suite de l’odyssée Ibn Battûta 2016 pour la construction d’un réseau Maghreb – Europe qui défend les droits de toutes et tous.
Pour les droits des migrants à la dignité
Rien qu’en octobre, environ 4500 Tunisiens désespérés ont pris le large pour atteindre les côtes du nord de la Méditerranée suite à l’échec des politiques économiques et sociales et au manque de perspectives des mécanismes mis en place de migrations régulières. Selon des informations concernant les accords non rendus publics, il est prévu l’expulsion immédiate des Tunisiens sans aucun examen de leur cas individuel.
La mission d’observation composée de Youness RHOUMA du C.I.T.i.I. et de Moncef GUEDOUAR de la FTCR se sont rendu à Palerme et Lampedusa les 18 et 19 décembre 2017.
Ils ont eu des discussions avec des universitaires comme Hassen Slama, professeur universitaire à Palerme, et des acteurs de la société civile défenseur des migrants en Sicile et à Lampedusa.
Ils ont recueilli des témoignages de jeunes migrants tunisiens, des intervenants institutionnels (pompiers et gendarmes) ainsi que des bénévoles qui soutiennent quotidiennement les droits des migrants à Lampedusa et à Palerme.
A l’ile de Lampedusa les bénévoles sont organisé dans un collectif de soutien qui ne dispose pas de moyens pour permettre l’organisation d’une véritable permanence d’accueil et d’orientation des migrants et solliciter les juristes et les avocats pour plaider les droits des migrants.
La présence des forces armées, de la gendarmerie et de la police sur l’ile de Lampedusa fait penser à véritable état de siège. Les migrants dont une grande partie sont des Tunisiens sont parqués dans un camp mais qui n’empêchent pas les jeunes d’en sortir. Beaucoup de ces jeunes ont préféré quitté le camp de rétention et dormir dans les bois environnants pour fuir les mauvais traitements et les brimades des forces sécuritaires.
Des expulsions massives sont organisés contre les Tunisiens qui sont emmené par avion en Sicile à Palerme pour être expulsés vers la Tunisie. Le consul Tunisien et les agents tunisiens se prêtent à ces expulsions massives et accordent debout dans le hall de l’aéroport en quelques secondes l’autorisation d’expulser sans aucun entretien individuel sérieux et approfondi. L’expulsion massive des centaines de jeunes Tunisiens s’est accrue ces derniers jours en lien avec la visite des responsables Tunisiens en Sicile et Italiens en Tunisie. Cette situation n’est pas exempte de « d’erreurs de fonctionnement » ainsi d’après des témoins le 18 décembre l’avion d’un groupe de plus de 25 Tunisiens a été obligé d’atterrir à l’aéroport de Palerme suite à une panne, et les jeunes ont quitté l’aéroport.
L’absence de conditions de détention digne et respectueuse des droits a engendré des Catastrophes humanitaires.
Les mal traitements; les brimades, les conditions d’hygiènes minimales poussent les jeunes à quitter le centre et à se réfugier dans la nature environnantes sans aucun moyen de couchage et de campement.
Certains jeunes voulant quitter cet univers carcéral à tout prix emprunte un bateau-déchets de Lampedusa à Agrigente en Sicile. Ce bateau achemine des déchets broyé et malaxé formant une sorte de boue. La mission de l’observatoire a assisté au repêchage de 8 migrants caché dans le camion transportant cette boue toxique. La mission a recueilli l’information selon un témoin sur l’ile de Lampedusa de la mort d’un jeune migrant durant ces voyages des déchets. On parle aussi de disparition en mer.
La mission s’est réunie avec ses amis d’Italie, et aux vues de ses observations formule les recommandations suivantes :
- Rendre publique immédiatement tout accord Tuniso-Italien éventuel secret concernant l’expulsion des migrants tunisien d’Italie et de revoir les accords bilatéraux Tunisio-Italien.
- Fournir une aide urgente pour le Collectif de soutien des migrants à Lampedusa.
- Organiser à Lampedusa une permanence d’accueil et d’orientation des migrants appuyée par des avocats.
- Permettre aux associations et défenseurs des droits et avocats d’entrer dans le centre de détention de Lampedusa et de discuter avec les migrants.
- Demande aux autorités consulaires tunisiennes de ne pas participer aux expulsions massives illégales des migrants.
- Demande l’application du droits en matières de séjours, de refuge et d’asile et de l’application effective des droits des migrants aux recours contre toutes ces mesures d’expulsions massives interdites par les lois et conventions internationales de protection des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile.
- La fermeture des centres illégaux de détention appelés CIE en Italie et de transformer celui de Lampedusa en un véritable centre d’accueil et de premier secours et non comme il est actuellement.
- L’accueil de tous les migrants présents à Lampedusa, en Sicile et dans toute l’Italie dans des conditions dignes.
- L’arrêt de la militarisation de l’Ile de Lampedusa et des zones de non droits et l’ouverture immédiate de discussion bilatérale entre les élus de l’Ile Italienne et les élus Tunisiens pour la mise en place de véritables accords de coopérations bénéfiques aux deux parties.
- Demande aux autorités tunisiennes gouvernementales et administratives d’ouvrir un dialogue immédiat et sérieux avec les associations de migrants, et ce conformément aux recommandations du document de la stratégie nationale migratoire (SNM) en instance d’adoption par le conseil des ministres tunisien et qui stipule:
La SNM accorde un intérêt particulier aux TRE afin de défendre leurs droits et de les associer activement aux transitions politiques et économiques du pays, en se référant aux valeurs des droits de l’Homme inscrites dans la Constitution de la deuxième République, et dans les accords bilatéraux et multilatéraux relatifs aux migrations ratifiés par la Tunisie. Ainsi que : Le respect des droits et de la dignité des migrants et des membres de leur famille, sans distinction de sexe, d’âge, d’origine, ou de statut, tout en étant sensible aux questions de genre.
10. Préconise la création d’un vaste réseau méditerranéen pour la protection des migrants, un réseau sans exclusive où rejet et où toutes les organisations qui le souhaitent puissent enfin travailler dans le respect et l’unité.
11. Demande la mise en place d’une commission parlementaire tunisienne mixte comprenant des représentants des juges, avocats et société civile pour enquêter sur les conditions des migrants à Lampedusa et les expulsions massives et forcées des ressortissants tunisiens.
12. Lance un appel pressant aux bailleurs de fonds amis pour aider mettre en pratiques les différentes propositions.