Le REF à la COP22 !
Une délégation du Réseau Euromed France (REF), composée de Roland Biache – Président, Giovanna Tanzarella – Vice-Présidente, Sarah Chelal et Marion Beauchamp – chargées de mission, était présente à la COP 22 à Marrakech, du 15 au 18 novembre 2016.
Cette délégation a participé aux activités de la zone verte, réservée à la société civile, et de la zone autogérée, réservée et sous la responsabilité de la société civile. C’est d’ailleurs dans cet espace que le REF a tenu une demi-journée de réflexion sur l’espace méditerranéen, en partenariat avec le Réseau Euromed Marocain des ONG et l’AITEC (association membre du REF).
L’espace méditerranéen est, en effet, un des premiers touchés par le changement climatique, notamment sur la rive sud. La société civile a un rôle à jouer dans la lutte pour la justice climatique et doit se mobiliser pour que les destructions environnementales cessent et que les droits humains soient toujours une priorité du développement durable. Roland Biache a rappelé l’importance mais l’inégale application des droits économique, sociaux et culturels dans un atelier intitulé « Droits et démocratie ». Giovanna Tanzarella a conduit une réflexion sur les migrations dans l’espace euro-méditerranéen, dans un atelier auquel plus de 35 personnes ont assisté.
Le REF a aussi pu rencontrer d’autres acteurs impliqués et mobilisés dans la lutte pour la justice climatique au sein de la zone verte, notamment le Centre d’Actions et de Réalisations Internationals (CARI) et le Comité pour le Développement et le Patrimoine (CDP), tous deux membres du REF. La FTCR et l’AITEC, eux aussi adhérents, étaient très actifs durant les deux semaines de la COP, en zone autogérée.
Le REF à la COP22 – Entretien avec Tarek Ben Hiba
Membre fondateur de l’Odyssée des alternatives – Ibn Battûta, la Fédération tunisienne pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR)* s’est largement impliquée dans la lutte pour la justice climatique. Tarek Ben Hiba, secrétaire-général de la fédération, nous raconte cette aventure collective et son implication dans la COP 22.
*Association membre du Réseau Euromed France (REF)
» L’Odyssée est liée à la COP22 et à la problématique de la mobilisation des organisations de solidarités internationales issues des migrations (OSIM) dans la lutte contre le changement climatique.
Quand j’étais jeune et habitais à Bizerte, un bateau : le Caribia, accostait tous les mercredi et mettait en lien les ports de la côte tunisienne. C’est ce souvenir vibrant qui m’a inspiré pour l’Odyssée.
Bien sûr, un projet visant à relier les ports de la Méditerranée entre eux, en bateau est très coûteux. Il y a à prendre en compte le prix du fuel sur les bateaux, mais aussi le fait que ce soit un polluant, et donc qu’on soit dans une configuration pratique qui va contre notre discours..le diesel demande des bateaux plus gros.
Au final, nous avons choisi deux voiliers : un catamaran et un monocoque.
Les ports que nous avons accostés sont les suivants, dans l’ordre du trajet : [**Barcelone – Seyne-sur-Mer —Porto Torrès – Bizerte – (nous avons rejoint en voiture) Gabès – Djerba – Bizerte — Alger — Oran et, enfin, Tanger*]. Dans chaque port, une activité était organisée, en invitant les militants (notamment les jeunes) de la région et, de fait, présents dans tous les pays.
La préparation de l’étape algérienne a révélé quelque chose de très positif : avant peu de relations existaient, mais maintenant de véritables contacts se sont noués. Même au niveau des autorités, à Alger par exemple, on nous a donné le feu vert pour les activités. Algérois et Sahraouis ont été ravis de cette expérience.
En Tunisie, l’escale à Gabès nous a permis de rencontrer le mouvement Stop Pollution qui lutte depuis quelques années contre les groupes d’exploitation de phosphate qui ont fait de Gabès un ville-oasis martyr de l’écologie.
On a donc organisé un forum à Gabès, peu de temps après la mort d’un ouvrier électricien. Ce dernier est décédé à cause des gaz d’ammoniaque toxique.
Les autorités locales ont eu peur que cela s’ébruite et ont annulé notre réservation de salle.
Nous avons néanmoins réussi à trouver une autre salle et le forum a pu se tenir.
A Jemna : des ouvriers ont pris l’oasis en main et gèrent la production. Avec les bénéfices, ils ont mis en place un système d’ambulance, financé les école, etc. Le gouvernement et les forces politiques ne sont pas ravies de tant de succès. Mais cela montre bien le pouvoir de la mobilisation citoyenne.
A Tunis, nous avons rencontré une association de chiffoniers. On compte environ 70 000 personne qui vivent ainsi du tri des déchets. Un travail qu’ils veulent valoriser. En Egypte, des mouvements similaires existent. L’Odyssée les a donc mis en contact.
C’est aussi cela le but de l’Odyssée : mettre les gens en contact, faire connaître les initiatives qui n’attendent pas les gouvernements pour changer les choses.
A Tanger, nous avons eu l’aide de la région de Tanger et de la Coalition marocaine pour la Justice climatique (CMJC). A la COP, on a beaucoup participé aux ateliers de la zone auto-gérée. Mais il vaut mieux être ‘in & off’ : être en zone autogérée et en zone verte.
Pour les OSIM, la nouvelle préoccupation ce sont les migrations climatiques. On a déjà beaucoup lutté contre les discriminations. Mais aujourd’hui, il faut aussi porter nos revendications.
A l’instar de la pression de la société civile pour créer une cour internationale de justice, il faut aujourd’hui créer une cour internationale de justice climatique. Les dégâts climatiques sont des crimes et ont des responsables : ce sont des faits humains. Il faut donc faire un travail de qualification des crimes et de responsabilisation pour ceux qui les commettent.
Quant à l’Odyssée, nous souhaitons tous continuer mais nous faisons face à des problèmes de moyens. C’est à la fois un travail inter-maghrébin, un travail avec les associations françaises, et aussi une volonté de toucher et de relier les autres régions en Méditerranée. Il faut que nous trouvions comment faire durer ce projet »
Propos recueillis le 18 novembre – Marrakech
Entretien avec Yousef Habash
Présent à la COP 22 en tant que président du Comité pour le Développement et la Patrimoine (CDP)* et membre de la délégation de la société civile palestinienne, Yousef Habash nous raconte son expérience de défenseur de la justice climatique. De la COP 21 à la COP 22, il nous livre les avancées des organisations de la société civile et des mouvements sociaux en Méditerranée, et plus précisément en Palestine.
*Association membre du Réseau Euromed France (REF)
« Le Comité pour le Développement et le Patrimoine estime que mouvements sociaux et société civile sont connectés. C’est pour cela que le CDP a participé aux deux Forums Sociaux Mondiaux à Tunis. C’est pour cela que nous travaillons dans toute la région Méditerranéenne : au Sud, au Nord – avec la France, avec l’Italie, avec l’Espagne.
Pour nous, la justice climatique et la justice sociale sont intimement liées. Après la COP 21 il nous semblait primordial de lier la France avec les autres pays de la Méditerranée. Notre initiative « De la COP 21 à la COP 22 » avait pour but de mettre en lumières les ONG et les citoyens engagés de Palestine. En août : la Coalition palestinienne pour la Justice climatique a été créée. Elle voulait inclure et même mettre en avant l’implication des jeunes et des femmes dans cette problématique.
Nous avons participé à la Conférence de la jeunesse organisée par l’ONU – la COY 12 (12e Conference of Youth) : c’est la première fois qu’ils incluaient la Palestine et la jeunesse palestinienne.
Pour la journée internationale de la femme, le CDP a aussi organisé une conférence portant sur le rôle des femmes dans la lutte contre le changement climatique.
Aujourd’hui, en tant que société civile, nous ne devons plus uniquement défendre la société contre les attaques contre ses droits. Nous devons aussi lutter ensemble contre le changement climatique, qui nous touche tous.
En tant que CDP, nous avons participé à l’Assemblée générale de la COP 22, là où les négociations multilatérales ont lieu. Le résultat de nos négociations ont abouti à la création d’une Plateforme Euromed de la jeunesse pour la justice climatique.
Enfin, en ce qui concerne la Palestine, on voit que le pays a signé les Accords de Paris, et cette année, pour la première fois, une délégation de la société civile a été invitée. Elle a mis en place de nombreuses activités en zone verte et en zone bleue.
C’est la première fois ! Et je pense que cela montre un réel progrès. »
Propos recueillis le 18 novembre – Marrakech
Mobilisation pour l’Agenda 2030
Philippe JAHSHAN, Président du Mouvement Associatif et de Coordination SUD (dont le REF est membre associé), Délégué aux Relations Extérieures de Solidarité Laïque a présenté l’Avis du CESE sur la Politique française de coopération internationale dans le cadre de l’Agenda 2030 du développement durable le 12 octobre dernier.
Le Ministère de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer a commencé en juin dernier, et de façon concertée, la réalisation d’un « Plan national d’actions » pour les ODD.
Ce Plan d’actions est pris en compte par les organisations de la société civile du domaine de la solidarité pour le décliner dans ses actions et programmes afin de contribuer directement à sa mise en œuvre dans les territoires.
Certains ODD ont déjà vu un début de mise en œuvre dans les programmes des organisations membres du Réseau Euromed France (REF) à l’international comme en France.
Parmi les dix-sept objectifs de développement durable retenus par l’ONU, il y en a un qui concerne plus particulièrement la Méditerranée : « Réduire les inégalités au sein des pays et entre les pays ».
En effet, l’exclusion a été le catalyseur des révolutions arabes qui ont révélé l’ampleur des frustrations ressenties par les populations marginalisées, et reste le principal facteur de la contestation sociale dans certains pays, et de conflits dans d’autres. Cette exclusion touche particulièrement les jeunes et les femmes des régions éloignées des grands centres économiques.
Ce constat est très vite ressorti des rencontres franco-libyennes et franco-syriennes organisées par le REF, ses membres et les partenaires locaux. Les stages de renforcement des capacités des jeunes de la société civile, en Syrie et en Libye, organisés par le réseau chaque année ont vocation à proposer des solutions pour palier à cet état de fait et ainsi participer à la réalisation des ODD.
Une seconde étape a été franchie à l’occasion de la participation de membres du REF à la COP 22 en novembre prochain.
Le REF, avec ses organisations membres, soutient la plupart des propositions de l’avis du CESE sur la « politique française de coopération internationale dans de cadre de l’Agenda 2030 du développement durable », et en particulier la nécessité d’une implication accrue de la société civile.
La synthèse et l’avis sont disponibles dans leur intégralité en cliquant sur le fichier lié.
la_politique_de_cooperation_a_l_internationale.pdf La synthèse du CESE
politique_de_cooperation_a_l_internationale_-_2.pdf L’avis du CESE
Une soirée de restitution de la participation de la société civile à la COP22 a été organisée le 29 novembre 2016, de 18h30 à 20h30, pour rendre compte de cette mobilisation. L’événement s’est tenu au 7, rue des Carmes – 75005 Paris.
Sont intervenus :
- Roland Biache, président du REF et délégué général de Solidarité Laïque,
- Tarek Ben Hiba, vice-président du REF et secrétaire général de la Fédération Tunisienne pour une Citoyenneté des Deux Rives (FTCR),
- Yousef Habash, directeur du Comité pour le Développement et le Patrimoine (CDP).